Justice Européenne, le plombier polonais.....

Publié le par Sylvaine Vulpiani

Alors que le Président de la République annonce la possibilité aux travailleurs des pays de l'Est de venir plus facilement travailler en France que faut-il penser des 3 décisions de la Cour de Justice des Communautés Européennes…. 

L’affaire Viking en Finlande

Viking Line, une compagnie de transport de passager finlandaise, propriétaire d’un ferry, décide pour baisser ses coûts d’exploitation d’immatriculer ce navire en Estonie afin d’employer des salariés estoniens rémunérés à un salaire inférieur à ceux des finlandais.

La mobilisation des marins finlandais et les actions de la Fédération Internationale des Transports ITF ont mis en échec ce projet de délocalisation. Suite à une plainte de la Ste Viking, la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE)  a été saisie. Dans son jugement du 11 décembre 2007, elle a donné tord au syndicat finlandais aux motifs suivants : «  la Cour relève que les règles du traité relatives à la liberté d’établissement s’appliquent à une action collective engagée par un syndicat ou un groupement de syndicat (….) Les dispositions sur la liberté établissement confèrent des droits à une entreprise privée qui peuvent être opposées à un syndicat ou une association syndicale ». La base juridique de cette décision trouve son fondement dans l’article 43 du TCE (traité des communautés européennes) et repris dans le Traité de Lisbonne de 2007 « Les restrictions à la liberté d’établissement des ressortissants d’un Etat membre dans le territoire d’un autre Etat membre sont interdites »
 
Les règles du Traité sur la « liberté d’établissement » priment avant tout et en l’espèce permettent le développement des pavillons de complaisance en condamnant l’action syndicale. 

2ème arrêt  : L’affaire Laval en Suède

Une entreprise de droit letton « Laval » détache plusieurs salariés pour l’exécution d’un chantier en Suède. Le syndicat suédois du secteur du bâtiment et des travaux publics, pour déterminer le salaire des travailleurs lettons et prévoir l’adhésion de cette entreprise à la convention collective suédoise du bâtiment, engage des négociations suivants la législation suédoise. Le refus de l’entreprise lettonne de négocier déclenche une action syndicale prenant la forme d’un blocus et à pour effet d’interrompre le chantier.
 
Le 18 décembre 2007, la CJCE a jugé illégal le blocus « une telle action collective, prenant la forme d’un blocus de chantiers, constitue une restriction la libre prestation des services qui, en l’espèce, n’est pas justifiée au regard de l’objectif d’intérêts général de protection des travailleurs ».  Cette décision trouve son fondement dans l’article 49 du Traité interdisant tout restriction à la libre prestation des services, article repris là encore dans le Traité de Lisbonne de 2007. Et l’argument de la Cour est le suivant : « la loi suédoise relative au détachement des travailleurs précise les conditions de travail et d’emploi relevant des matières énumérées dans la directive 96/71/CE, à l’exception des taux de salaire minimal. La loi est muette en ce qui concerne les rémunération, dont la détermination est traditionnellement confiée en Suède aux partenaires sociaux, par la voie de la négociation ». 

3ème arrêt En Allemagne

Le 3 avril 2008, la Cour de Justice des Communautés Européennes confirme le principe du pays d’origine dans la jurisprudence européenne et remet en cause le droit de grève. L’arrêt Rüffert éclaire d’un nouveau jour  la question de la passation des marchés publics. En effet, le Land de Basse Saxe oblige les entreprises bénéficiaires de marchés publics à appliquer et à faire appliquer à leurs sous-traitants la convention collective des travaux publics. Mais la CJCE conteste cette disposition en affirmant : « la directive 96/71/CE, concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services, interprétée à la lumière de l’article 49 CE, s’oppose, dans une situation telle que celle en cause au principal, à une mesure à caractère législatif, prise par une autorité d’un État membre, prescrivant au pouvoir adjudicateur de ne désigner comme adjudicataires de marchés publics de travaux que les entreprises qui, lors de la soumission, s’engagent par écrit à verser à leurs salariés, en contrepartie de l’exécution des prestations concernées, au minimum la rémunération prévue dans la convention collective applicable au lieu d’exécution de celles-ci »

Ces arrêts confirment que le droit de l’Union Européenne est supérieur au droit des Etats membres dans le domaine du droit du travail. Quel obstacle au dumping social…. Aou  au principe du marché intérieur quand il rythme avec « une harmonisation des salaires vers le bas ». 
Et maintenant ?

 

Publié dans commentaire

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article